mardi 22 septembre 2015

"Connais-toi toi-même mais connais tes limites" Cynthia Fleury et Jean-Richard Freymann, les "Bibliothèques idéales" - Strasbourg du 20 septembre 2015.


Jean-Richard Freymann et Cynthia Fleury
Photo : Virginie Le chêne parlant

Qu’est-ce que l’individuation ?

L’individuation est une tentative d’être responsable.
Une tentative d’irremplacibilité…  Ce qui n’a rien à voir avec un égocentrisme démesuré. La question touche à la singularité. « C’est prendre sur soi la part d’accès au réel. »
Alexis de Tocqueville a posé une « Equation des travestissements démocratiques ».  Ce dernier a saisi que dans la démocratie, la démocratie occidentale, un principe se transforme en passion.  Passion de la liberté, exercice de toute puissance. Principe de l’égalité, passion de l’égalitarisme.
 Alexis de Tocqueville, précise Cynthia Fleury dans « Les pathologies de la démocratie : « a en effet, mis le doigt sur le phénomène – typiquement démocratique – de l'assimilation entre liberté et libéralisme, entraînant la dissolution progressive de la notion d'intérêt général, ou encore de ce que Robespierre appelait « la morale publique ». Il a parfaitement vu que le citoyen, pour mieux s'individualiser, pratiquerait la surenchère des valorisations identitaires et sécessionnistes. Edgar Morin l'a lui aussi souvent souligné : l'individuation n'est pas l'individualisme. Et seule la première est au fondement des démocraties naissantes.»1*.
Principe d’individuation où la passion de l’individuation devient l’individualisme. La philosophe ajoute : « Entre démocraties naissantes et démocraties adultes, la conception de l'égalité s'est modifiée : aujourd'hui, on n'est pas « égal » parce que similaire, on est « égal » parce que différent. Si pour Tocqueville, « le fait majeur » des démocraties était l'effacement des distinctions » [Serge Audier, Tocqueville retrouvé. Genèse et enjeux du renouveau tocquevillien français, Paris, Vrin/ EHESS, 2004, p 71] , il n'en va pas de même pour tout observateur du régime démocratique actuel : le « fait majeur » renvoie à la cristallisation et à survalorisation des différences culturelles et identitaires. Le projet est sans nul doute séduisant – le droit à la différence étant un principe démocratique essentiel -, mais les risques de segmentation de la société s'en trouvent aussi démultiplié. » 2*
Dans cet univers d’égalisation, la plus petite inégalité – s’étonne Tocqueville -  blesse l’œil.
Connais-toi toi-même ça veut dire : tu n’es pas monde… Tu es manquant. Comment sublimer ce manque ? En faisant lien. Lien avec les autres, lien avec soi-même. Il s’agit également de devenir « adulte être soi-même en autolimitant le déploiement de ce « soi-même »  ; en un mot, surveiller sa toute-puissance. »3*


Extrait numéro 1 de la rencontre de Cynthia Fleury et Jean-Richard Freymann 
"Connais-toi toi-même mais connais tes limites" 
ayant eu lieu lors de la manifestation strasbourgeoise des "Bibliothèques idéales" - 
incertitudes du 20 septembre 2015.

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Cynthia Fleury, Les pathologies de la démocratie, Fayard, 2005, ISBN : 2-213-62322-8
1* p 105.
2* p 82- 83.
3* P108 : « Ainsi, atteindre l'âge adulte, c'est assumer la singularité de sa personnalité sans peser sur celle des autres, comprendre que le « souci de soi » passe par la découverte de sa nuisibilité naturelle. Être adulte c'est être soi-même en autolimitant le déploiement de ce « soi-même »  ; en un mot, surveiller sa toute-puissance. »

P 104 : De fait, Antoine Rédier, souligne que Tocqueville, contrairement aux libéraux, juge nécessaire que tous les esprits soient astreints à certaines limites dans le domaine spirituel, de sorte que la société demeure unifiée par des croyances communes.
PP 104- 105 : Note bas de page : Je nous crois spontanément tous « libéraux » et de droite : nous avons tous le souci naturel de veiller à notre préservation, de nous préférer toujours à autrui sans réelle mauvaise intention, de faire tout ce qu'il y a en notre pouvoir – au risque que cela entre en concurrence avec l'intérêt d'autrui – pour nous « conserver » de la meilleure des façons possibles. Dans sa version digne et impérative, cela s'appelle le conatus, cet « appétit de vivre » qui, selon Spinoza, s'identifie à l'appétit de soi. Mais si naturellement « libéral » et de droite fait sens, je vois mal comment cela fait sens politiquement, voire intellectuellement. A moins d'œuvrer à faire en sorte que ce souci primordial tourne à la caricature. Bref, de ce point de vue, je perçois mal la pertinence et la valeur politiques de voter à droite. Faire de la politique, résister au libéralisme ou voter à gauche n'est-ce pas considérer que le travail du politique consiste précisément à rééquilibrer les tendances naturelles et à veiller à ce que le naturel ne dégénère pas ? Faire de la politique, c'est lutter contre l'entropie naturelle et non la renforcer. 

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Vidéo 2 :
Qu’est-ce que le courage ?
Quand le chemin de l’érosion est interminable, vous devenez vulnérable.

Vous n’êtes même pas une ressource pour vous-même. Or le courage – contrairement à ce que l’on entend souvent - a un effet de protection du sujet.





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Vidéo 3 

« Nous sommes d’un âge immense. » Gustave Young
Un individu est capable de circuler dans le temps, de faire lien avec le passé.
Le terme d’individuation est intéressant car il est en face à face avec celui d’individualisme. On se dit tiens… pourquoi individuation et pas individualisme ?

L’individuation est ouverture, l’enjeu de la personne confine à celui du lien. Il y a des jeux de force.


  


Vidéo 4 :

La base de la juste individuation, c’est la bonne compagnie.

S’étonner. Parler.  Développer un jeu de paroles. Dialoguer afin de bâtir du monde commun. 






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