André Comte-Sponville
Merci de son accord gracieux pour cette mise en ligne ainsi que celui du commissaire d’exposition : Monsieur Bruno Girveau.
Qu’est-ce que la joie ? Qu’est-ce que le bonheur ?
Qu’est-ce que la joie de vivre ? André Comte-Sponville éclaire le sujet
d’une lumière franche et éblouissante.
Ecoutons…
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Épicure développe une philosophie
en tant qu’ataraxie, c’est-à-dire « absence de trouble ». Une
existence solide. Détachée. Tout à la fois sereine et distante. Mais cela
est-il possible ?
Face aux événements dramatiques,
à l’heure des attentats actuels, peut-on se dire, s’affirmer, s’afficher en
tant que sujet séparé de ces derniers ? Élément parfaitement extérieur à
ces événements ? Hors champ ? Hors trouble ?
La vie est fragile et aisée à
troubler, dit Montaigne.
André Compte-Sponville milite
pour cette sagesse de second rang - au sens de Montaigne - pour ceux qui ne se
revendiquent pas comme sage ; et, au reste, n’envisagent même pas de le
devenir.
Tentatives de définitions…
La joie – telle la couleur pour
un aveugle - est une émotion, un affect tellement fondamental qu’il est à peu
près impossible à définir.
Pour Descartes, la joie est une
agréable émotion de l’âme. La joie, dans ces conditions, serait donc un plaisir
de l’âme… Mais encore ?
Peut-on tenter de l’approcher par
le bonheur ? … Au reste, ce dernier
étant confondu avec la joie, qu’est-il ? Peut-on l’être ? A-t-on
jamais vraiment été heureux ?
Le bonheur n’est pas une joie
constante, permanente, immuable, explicite le philosophe. Ce serait au reste l’assimiler
à de la félicité. Or, par sa permanence, cette dernière est impossible.
Est-ce le désir ? Un désir
est ouvert à l’infini, insatiable. Or, la satisfaction de tous nos désirs - un
désir permanent - est également impossible.
Kant explique que « Le
bonheur est un idéal non de la raison mais de l’imagination ». En gros –
et en détail - tout le monde en rêve, mais ne sait comment l’atteindre.
On peut donc tenter de le définir
par son contraire, le malheur.
Le malheur n’est pas le fruit de
l’imagination, mais celui de l’expérience.
J’appelle bonheur toute période
dans laquelle la joie paraît continûment possible.
La joie relève du moment.
Le bonheur s’installe dans la
durée. C’est une joie continûment possible.
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Peut-on s’accommoder du
tragique ?
« Une pas assez
constante pensée de la mort
n’a donné pas assez de
prix au plus petit instant de ta vie. »
André Gide.
André Comte-Sponville – deuxième
partie de la conférence « Joie de vivre » dispensée le 2 décembre
2015 à l’auditorium du Musée des Beaux Arts de Lille. Merci à ce dernier ainsi
qu’au commissaire d’exposition, Monsieur Bruno Girveau, de leurs accords
gracieux.
Peut-on s’accommoder du
tragique ?
Oui, répond le philosophe André
Comte-Sponville. Parce que la vie est
fragile, tragique, parce que le malheur existe, il faut savoir en profiter. Pour
reprendre André Gide « Une pas assez constante pensée de la mort n’a donné
pas assez de prix au plus petit instant de ta vie. »
Qu’est-ce que cela
signifie ?
Si nous nous rappelions plus
souvent que nous allons mourir… Alors chaque instant de notre vie - et de celle
de nos proches - serait d’autant plus précieux, d’autant plus intense qu’il se
détacherait – pour citer encore André Gide -
sur « le fond très obscur de la mort ».
Autrement dit, si nous ne
mourrions pas – explicite le philosophe - nous pourrions dédaigner de vivre ou
vivre sans y prêter attention, en laissant les choses filer. Mais comme nous
savons que nous allons mourir. Sans savoir quand. Comme la vie est fragile,
tendre, alors devrions-nous profiter de chaque instant, respirer notre vie et
celle de ceux que nous aimons avec force
intensité.
Ainsi Clément Rosset a-t-il
raison – bien sûr – de souligner combien la joie et le tragique doivent aller
ensemble, marcher de concert.
Pour en revenir à la joie de
vivre…
C’est la plus difficile à saisir
de toutes les joies. Car souvent, nous sommes joyeux de quelque chose : un
repas, un rayon de soleil… Ce sont là moments éphémères soumis à des causes
extérieures, dépendant de quelque chose. Ainsi peuvent-ils s’effacer au coin d’un
nuage, disparaître sous le poids d’une indigestion.
La joie la plus délicieuse, la plus
pure – quant à elle – ne réclame aucune cause extérieure. Comme Clément Rosset
l’indique, elle n’a besoin d’aucune cause. C’est la joie légère : la pure
joie d’exister.
Dans ce cadre, La toile de
Picasso « Femmes courant sur la plage », en est l’illustration
parfaite. L’œuvre provoque un sentiment de monumentalité. Une prouesse. Une
immensité dans un petit format. Ces femmes ne sont pas joyeuses parce qu’elles courent
sur la plage. Elles courent parce qu’elles sont joyeuses.
Voilà une belle illustration de
la joie de vivre. L’inverse du désir d’avoir. L’inverse du désir de possession
illustré par Platon dans le Banquet. Pour faire simple, celui - par exemple - d’acquérir un réfrigérateur. Ce désir de
possession là est motivé par le manque. Les autres, ceux au désir comblé, n’éprouvant pas ce manque.
Dans cette optique de pensée, dès
qu’un désir est satisfait, il n’y a plus de manque. Et si le désir est manque,
il n’y a plus de désir. Dans ces
conditions, c’est un bonheur manqué.
Mais le désir se réduit-il à cela ?
Non, assurément, nous explicite André Comte-Sponville. Ne voir dans le désir que désir de
possession serait négliger un paramètre important. Ce serait oublier les
dimensions du désir en acte. Autrement dit un désir de faire. Un désir
satisfait dans l’instant. Un désir d’agir. Une sagesse de l’action. Le Conatus,
selon Spinoza, la puissance d’exister et d’agir, c’est-à-dire le désir de faire
ce qu’on fait au moment où on le fait... Un « bonheur en acte ». Celui
de parler aux autres lors d’une conférence. Voilà un désir satisfait au présent
sans être pour autant aboli. C’est un bonheur en acte qui se suffit à lui-même. Se
satisfait de l’instant. S’ancre dans le présent…
Le seul qui ne
manque pas.
« La poésie est l’amour réalisé du désir
demeuré désir. »
René Char.
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La sagesse : le silence voluptueux de vivre ?
Parfois, il faut savoir arrêter de penser nous dit le
philosophe André Comte-Sponville dans une conférence consacrée à la « Joie
de Vivre ».
La sagesse, ajoute-t-il, c’est le silence de l’esprit. Une
certaine qualité de silence. La joie de vivre serait, de même, plutôt du côté
du côté du silence, de l’éclat de rire. Un affect, un sentiment, une émotion…
Le silence voluptueux de vivre.
Qu’est-ce que la joie ? Qu’est-ce que le bonheur ?
Qu’est-ce que la joie de vivre ? André Comte-Sponville éclaire le sujet
d’une lumière franche et éblouissante.
Merci de son accord gracieux pour cette mise en ligne ainsi
que celui du commissaire d’exposition : Monsieur Bruno Girveau.
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« Le pessimisme est d’humeur, l’optimisme de volonté. » Alain
Un pessimiste rencontre un optimiste et lui dit :
« Oh dites donc, ça ne pourrait pas être pire. » L’optimiste lui
répond : « Mais si, mais si. »
Le pessimiste prend des mesures, anticipe, se protège. C’est
le pessimisme de l’intelligence, selon Gramsci … Au fond, mieux vaut voir les
choses comme elles sont. Mieux vaut les noircir un peu afin d’être plus
vigilant. Sans pour autant négliger l’optimiste de la volonté… Pour changer les
choses encore faut-il croire que c’est possible.
Le pessimiste, le parachute. L’optimiste invente l’avion …
Les deux sont complémentaires.
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"Le beau c'est ce qui
désespère." Paul Valéry. Ce qui est beau, c'est ce qui nous met dans un
état où l'on n'espère plus rien parce qu'on est complet dans l'instant. Un état
de plénitude où l'on est comblé. Où l'on n'espère plus rien que ce que l'on
voit ou vit.
La douceur d'écouter Schubert...
Il console en jouant l'inconsolable.
Un petit moment de bonheur...
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Le gif est un genre littéraire : le gif c'est un moment.
RépondreSupprimerLe gif est un genre littéraire : le lecteur lit le gif.
Le gif n'a pas de son : si, si.
Le gif de notre festin presque fictif est un genre littéraire.
Frédéric Schiffter prépare un article sur la joie chez Clément Rosset : le Bon[heu]r c'est un gif.
Cher Alfonso,
RépondreSupprimerComment ne pas m'accorder à vos images ? La légère déclivité d'une plume soulevée par la brise, la brume duveteuse caressée au vent de l'hiver, et voilà le jour solidifié en un cristal d'instant.
Meilleurs vœux à vous, à Françoise, Frédéric et à tous les êtres de pensées si chers à notre déraison sentimentale.