La chanson n’est-elle qu’un air fixé par
des paroles ?
Certaines chansons populaires, quasi
poétiques, n’évoquent-elles pas plus que ce qu’elles disent ? Les
hit-parades ne méritent-ils pas d’être étudiés ?
Stéphane Hirschi décode les chants
ordinaires, analyse la richesse de morceaux trop ressassés pour ne pas faire
l’objet de chantonnements réflexes, trop entendus pour être réellement écoutés.
Certaines chansons – extrêmement efficaces
– parviennent, en effet, à créer des émotions fortes. Ces créations regorgent
de paroles faciles à mémoriser, de musiques aisées à fredonner, le tout enrobé
de sentiments vécus par tous.
Le procédé créatif semble simple. Basique.
Ordinaire. Facile. Est-ce vraiment le cas ?
C’est que tout ne tourne peut-être pas
aussi rond qu’un disque vinyle sur une platine... Les mots d’allure ordinaire
creusent parfois des sillons subtils et le diamant des énoncés pailletés peut
scintiller de paradoxes fascinants.
Le premier d’entre eux est la
« posture de l’imposture ». Tout simplement, le chanteur se situe
tout entier dans son discours, qu’il veut sincère, alors qu’il évoque un passé
révolu. Pour ce faire, il se doit d’effacer les décalages séparant la réalité
présente de la scène d’hier.
Citons, pour exemple, Claude François où
la nostalgie douloureuse des amours passés regorge d’invocations joyeuses. Au
reste, ce paradoxe des opposés réunis dans une même phrase est souvent utilisé
au sein des chansons. C’est l’idée d’un chanteur détaché, pourtant extrêmement
impliqué dans l’événement qu’il rapporte. C’est la présence d’un discours
désespéré néanmoins jalonné de souvenirs heureux, d’instants foncièrement
positifs.
Ainsi les textes sont-ils truffés de
pensées antagonistes : désespoir / joie. Instants perdus/retrouvés.
Mais ceci va, bien entendu, plus loin que
la simple apposition / réunion de deux sentiments opposés. A
l’utilisation des décalages temporels – ironie de l’affirmation d’un
« pour toujours » qui n’a plus lieu d’être, s’ajoute une érotique de
la présence / absence, c’est-à-dire la mise en œuvre d’une
esthétique ambiguë où la personne disparue reste vivante
et demeure envoûtante malgré tout.
Merci à Stéphane Hirschi de son
aimable accord ainsi qu’à celui de Stéphane Chaudier.
Merci à Agnès Rabineau,
organisatrice des passerelles culturelles à la médiathèque du Vieux Lille
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