lundi 2 juillet 2018

S'imiter pour se parler, Boris Cyrulnik


L’imitation, au fil des générations, a perdu ses lettres de noblesse. Autrefois considérée comme une étape de formation quasi obligatoire - notamment dans le domaine de l’Art où copier des heures durant des modèles de chair ou de papier constituait le passage obligé des  candidats à l’Académie - elle fait aujourd’hui l’objet de reproches, de méfiance, voire d’un rejet définitif. Souvent assimilée à la reproduction du même, à la répétition d’un identique au geste prêt, au millième de la lettre, cette dernière est devenue suspecte, puis, peu à peu, s’est couverte sinon d’opprobre, au moins de mépris. Pourtant, le psychologue Jean Piaget dans Psychologie et pédagogie – La réponse du grand psychologue aux problèmes de l’enseignement, n’hésite pas à valoriser l’image mentale[1] tout en opposant pratiquement la copie à l’intelligence[2]

En outre l'imitation n'aurait-elle pas une utilité sociale ?
          

Albert Bandura est l’un des spécialistes de la « Théorie de l’apprentissage social » son intéressante position montre combien l’imitation fait partie du quotidien. Ainsi, lors des conduites sociales, fonctionnons-nous régulièrement par mimétisme social. Par exemple, lors de spectacles ou de cérémonies, se caler sur le comportement des autres, permet non seulement d’adopter à coup sûr le geste adéquat mais de le retenir afin de s’en servir ultérieurement. L’individu se construit des « représentations symboliques des événements modèles. L’acquisition est commandée par quatre sub-processus : l’attention discriminative, la rétention codée, la reproduction motrice, les effets de renforcement, enfin, qui renvoient à la motivation. » [3 ]
L'imitation constitue également le plus sûr moyen d'entrer en contact avec l'autre et ce dès la maternelle.

Écoutons...  




[1] D’où la troisième solution : l’image mentale, c’est-à-dire le symbole en tant que copie ou reproduction intérieure de l’objet, ne serait-elle pas simplement un produit l’intériorisation de l’imitation elle-même ? On sait assez, en effet, que l’image n’est pas simplement, comme on l’a cru longtemps, un simple prolongement de la perception. Elle résulte d’une construction, parente de celle qui engendre les schèmes de l’intelligence, mais dont les matériaux sont empruntés à une « matière sensible ». Or, ajoutons le, cette étoffe est motrice autant que sensible : entendre mentalement une mélodie et une chose, mais pouvoir la reproduire en précise singulièrement l’audition intérieure ; l’image visuelle également reste vague tant qu’elle ne peut se traduire en dessin ou en mime. P 71-72 :
Piaget Jean, La formation du symbole chez l’enfant, Paris, Delachaux et Niestlé, 1978 (citation double cf p 42)
[2] «… l’intelligence est une assimilation du donné à des structures de transformations, des structures d’actions élémentaires aux structures opératoires supérieures, et que ces structurations consistent à organiser le réel, en acte ou en pensée, et non pas à le copier simplement. » Piaget Jean,  Psychologie et pédagogie.  La réponse du grand psychologue aux problèmes de l’enseignement.  Paris, Médiations. Denoël. p 49
 [3]   Apprendre en imitant ? FaydaWinnykamen – Puf Psychologie d’aujourd’hui, octobre 1990, Paris, p 57. 

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